MARYAM PAGES 131 à 141 (incluses)
Maryam est dans la foule et elle a assisté à cet incroyable procès qui lui a laissé un goût amer dans la bouche. Comment ces gens ignobles ont-ils pu demander la tête de l’innocent au lieu de celle du coupable. Elle est mortifiée par l’ignominie et la perversité humaines. Les larmes lui montent aux yeux, mais elle sait qu’il sera temps pour pleurer, plus tard, quand le Christ ne sera plus parmi eux. Pour l’instant, elle se doit d’être courageuse, pour rester le plus près de lui, jusqu’au bout, afin qu’il sente la présence des êtres qui l’aiment, lors de ses ultimes instants sur terre.
Elle entend un cliquetis et se retourne. La vue de Jésus, encadré par une armée de soldats lui est une vision d’horreur. Ils se moquent de lui et le frappent en l’invectivant et c’est une image douloureuse. Ceux-ci emmènent le Christ au Prétoire, dans l’intérieur de la cour, où il sera supplicié avant sa mise à mort.
Le prétoire est étymologiquement l'endroit où se trouve le « praetor » qui signifie chef. Le mot peut être entendu sous divers sens. Le «prætorium» désigne le palais de Ponce Pilate, le procurateur romain de Judée, et c'est en ce lieu que Jésus (que bientôt tout le monde connaîtra sous celui de Jésus-Christ) est condamné à mort. Le prétoire du gouverneur romain de Judée est le palais d'Hérode à l'époque où vit Jésus.
Les soldats romains s’acharnent sur Jésus, lui ôtant ses vêtements, signifiant ainsi qu’ils lui enlèvent sa dignité d’être humain. Ensuite ils le recouvrent d’un manteau écarlate puis ils tressent une couronne d’épines qu’ils lui enfoncent sur la tête, faisant ainsi couler le sang sur son visage meurtri par la douleur. Pour parachever leur simulacre de royauté envers l’homme déchu, ils lui mettent un roseau dans sa main droite. Ensuite, ils fléchissent les genoux devant lui en l’invectivant « salut roi des Juifs ». Après s’être bien moqué du malheureux prisonnier, ils lui crachent au visage, puis lui arrachent son bâton de roseau, et le frappent sur la tête. Lorsqu’ils en ont fini avec leur amusement barbare, ils lui reprennent le manteau rouge, le revêtissent avec ses propres vêtements et l’emmènent pour aller le crucifier.
En sortant, ils voient un homme de Cyrène, nommé Simon, père d’Alexandre et de Rufus, à qui, ils imposent d’aider Jésus à porter sa croix jusqu’au Golgotha.
Le Golgotha ou Calvaire, nommé aussi « lieu du crâne », est une colline située dans l'Antiquité à l'extérieur de Jérusalem, sur laquelle les Romains attachaient les condamnés à mort sur une croix en forme de T.
Chez les romains il était d’usage que les condamnés emmènent leur propre croix jusqu’au lieu du supplice. De fait, ils ne portaient en réalité que la pièce transversale de la croix, celle sur laquelle leurs mains allaient être clouées, en l’occurrence une pièce de bois qui s’appelait « patibulum », ce qui signifie « qui mérite de porter une croix ». Cette appellation a donné le mot patibulaire en français. Cet objet est fixé ensuite sur un pieu vertical fiché en terre. Le mot « crux » en latin, croix en français, désignait au début un simple pieu planté en terre, puis a désigné l’ensemble du bois servant à la crucifixion. Les condamnés portaient le « patibulum » en travers des épaules, les avant-bras attachés au bois par des cordes.
Lors de sa traversée sur son chemin de douleur, Jésus remarque des femmes qui pleurent, tout en se frappant la poitrine et il leur demande de ne pas pleurer sur lui, puis il prophétise sur l’avenir de Jérusalem.
- « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et vos enfants, car voici des jours viennent, où on dira que les stériles, les ventres qui n’ont pas enfanté et les mamelles qui n’ont pas nourri, seront dites bienheureuses ».
(Mathieu chapitre 27, extrait des versets 27 à 32, Marc chapitre 15, extrait des versets 16 à 21, Luc chapitre 23, extrait des versets 26 à 32, Jean chapitre 19, extrait des versets 1 à 16).
Maryam est noyée dans la foule qui harangue Jésus tout au long du trajet funeste pour se rendre sur le lieu de son exécution. Elle a tellement mal pour lui. Elle tremble lorsqu’il chute, elle gémit lorsqu’’elle voit les soldats le frapper avec violence, pour le faire relever. Comment des êtres humains peuvent-ils être aussi cruels envers d’autres êtres humains ? Elle n’arrive pas à comprendre car tout en elle, n’est qu’empathie et compassion pour les autres.
En arrivant en haut du calvaire, Jésus est cloué sur la partie transversale avant d’être hissé, surplombant ainsi tous les spectateurs venus assister à sa mise à mort, soit pour l’insulter, soit pour prier pour lui, et implorer la clémence divine.
Pilate fait placer un écriteau que les romains désignent comme « titulus crucis » sur la croix de Jésus où il est inscrit « INRI », ce qui veut dire « le roi des juifs », et cela rend furieux les sacrificateurs du culte judaïque. Ceux-ci lui demandent de modifier l’inscription en mettant que lui a dit « je suis le roi des juifs » mais Pilate refuse d’accéder à leur revendication et maintient ce qui est écrit.
(Jean chapitre 19, extrait des versets 19 à 22).
INRI est l’acronyme de l’inscription IESVS NAZARENVS REX IVDÆORVM : «Jésus le Nazaréen, Roi des Juifs». L’usage de ce type de tablette était destiné à mentionner le motif de la condamnation.
Deux autres croix sont dressées, l’une à sa droite et l’autre à sa gauche. Ce sont deux brigands qui n’ont pas été graciés par le gouverneur. L’un des deux, se met à injurier Jésus, en se moquant de lui et de son prétendu pouvoir de roi des juifs mais l’autre larron le fait taire, en lui rétorquant, qu’eux méritent le sort qu’ils subissent pour les méfaits qu’ils ont commis mais que Jésus n’a rien fait de mal, et qu’il ne mérite pas la mort. Puis il se tourne vers Jésus et lui demande de se souvenir de lui, lorsqu’il sera dans son royaume. Jésus lui promet que ce jour même, il sera avec lui au paradis.
Une fois que les condamnés sont fixés sur leur potence, les soldats les surveillent tout en se partageant leurs vêtements. Leur convoitise se porte sur la tunique de Jésus qui est de bonne qualité, un vêtement sans couture, tissé tout d’une pièce depuis le haut jusqu’en bas. Ils ne veulent surtout pas qu’il soit déchiré, c’est pourquoi ils préfèrent le tirer au sort. En agissant ainsi, ils ont laissé s’accomplir les écritures qui prédisaient cela.
Le fait que la tunique de Jésus soit de bonne qualité et cousue d’un seul morceau permet de définir que Marie et Joseph, les parents de Jésus, sont d’une aisance relative. Joseph était charpentier de métier et son fils « adoptif » l’a été aussi, avant d’entreprendre ses trois années d’évangélisation dans toute la contrée. Son échoppe devait leur permettre de vivre assez confortablement.
Près de la croix, se tiennent Marie sa mère, la sœur de sa mère, Marie Jacobé qui est femme d’Alphée (6), mère de Jacques le Mineur et de Joset, Marie Salomé, mère des fils de Zébédée, Marie femme de Clopas (6), Marie de Magdala. Marie Jacobé serait la demi-sœur de Marie la mère de Jésus et de Marie Salomé. En effet Marie la mère du Christ est née du premier mariage d’Anne avec Joachim, alors que Marie Jacobé est issue de la deuxième union d’Anne avec Cléophas, lui-même frère de Joseph, l’époux de sa sœur utérine Marie, et père adoptif de Jésus, et Marie Salomé est quant à elle née du troisième mariage d’Anne avec un homme dénommé Salomas ou Salomé.
Parmi les premiers disciples ayant suivi la route de Jésus, Jacques le Majeur et Jean, fils de Zébédée et de Marie Salomé, ainsi que Jacques le Mineur et Joset, fils de Alphée et de Marie Jacobé (6) sont les demi-cousins germains de Jésus Christ par leur mère.
6) Selon les versions les deux frères sont aussi dits fils de Marie (femme de Clopas) et de Clopas, ce qui porte à confusion. Pour Jérôme de Stridon, il semblerait que le nom d’Alphée soit un autre nom de Clopas et Jacques le Mineur serait aussi dénommé Jacques d’Alphée. Donc il n’y aurait pas deux Marie, l’une femme de Clopas, et l’autre dite Marie Jacobé, femme d’Alphée, mais une seule nommée Marie Jacobé femme d’Alphée Clopas, et mère de Jacques d’Alphée et de Joset et potentiellement de Lévi-Mathieu si son père est bien le même Alphée.
Jésus voyant sa mère en larmes, lui montre son disciple Jean en lui disant, que désormais, ce sera son fils, puis il se tourne vers Jean, en lui disant qu’à partir de maintenant, elle sera sa mère (7). Jésus se sent rassuré de ne pas laisser sa mère abandonnée et de l’avoir confié à son disciple, ami et cousin. Sachant que bientôt, tout serait accompli, il attend que s’achève sa destinée terrestre, afin que la prophétie de Dieu se réalise.
(Mathieu chapitre 27, extrait des versets 33 à 44, Marc chapitre 15, extrait des versets 22 à 32, Luc chapitre 23, extrait des versets 33 à 43, Jean chapitre 19, extrait des versets 17 à 27).
7) Dans la bible, il est dit que Jésus avait au moins quatre frères Jacques, Joset, Jude et Simon et des sœurs. Ceux-ci auraient pu s’occuper de leur mère, après le décès de son fils premier né, pourtant il la confie à Jean qui est le neveu de sa mère. Pourquoi ? Pour les protestants, il y a bien des frères utérins de Jésus nés de Marie et Joseph après la naissance de Jésus, pour les orthodoxes, ce sont les enfants que Joseph auraient eu d’une première union avant son mariage avec Marie, et pour les catholiques, l’emploi des mots frères et sœurs s’appliquent aux cousins et cousines ou parents proches. On ne saura sans doute jamais la vérité.
Maryam est au pied de la croix, au milieu des autres femmes. Elles sont maintenues à distance par les soldats. Elles prient et elles pleurent sur le fils, l’homme, le prophète qu’elles chérissent.
A la sixième heure, l’obscurité se met à recouvrir toute la contrée. Il n’y a plus de soleil, plus de lumière. Tout devient de plus en plus sombre.
A la neuvième heure, Jésus s’écrie d’une voix forte :
- « Éli, Éli, lama sabachthani ? » ce qui signifie « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ».
Cela fait des heures que Jésus est cloué sur son objet de torture, et la soif lui brûle la gorge. Un soldat s’approche et lui tend une éponge trempée dans du vinaigre et du fiel. L’ayant goûté, il refuse d’en boire.
A l’époque, les soldats romains n’avaient droit qu’au vin aigri, qui n’est autre que du vinaigre. Il se disait que l’eau vinaigrée étanchait mieux la soif par son caractère acide.
Jésus est à bout de forces. Il crie une dernière fois.
- « Père entre tes mains, je remets mon esprit ».
Puis au bout de sa longue agonie, il rend son âme. A ce moment-là, le voile du temple se déchire en deux depuis le haut jusqu’en bas et la terre se met à trembler, les rochers se fendent et les sépulcres s’ouvrent.
Le centurion ainsi que les soldats qui veillent sur Jésus, prennent peur en constatant les phénomènes surprenants, déclenchés par la mort de Jésus. Le centurion s’agenouille et déclare que celui-ci était certainement le fils de Dieu.
Comme le soir venu était le début du jour du shabbat, les juifs ne veulent pas que les corps restent suspendus sur le gibet. Ils demandent à Pilate, la permission de rompre les jambes aux trois condamnés, afin de pouvoir les décrocher et les enterrer. Les soldats procèdent donc ainsi avec les deux brigands mais constatant que Jésus est déjà mort, ils ne lui brisent pas les jambes. Un soldat lui perce le flanc avec une lance et il en sort du sang et de l’eau, et il en fait témoignage auprès des autres.
Ainsi une fois de plus, les soldats romains ont été les instruments par lesquels les écritures s’accomplissent. En effet, il était dit que « pas un de ses os ne serait cassé », et « qu’ils regarderont vers celui qu’ils ont percé ».
(Mathieu chapitre 27, extrait des versets 45 à 56, Marc chapitre 15, extrait des versets 33 à 41, Luc chapitre 23, extrait des versets 44 à 49, Jean chapitre 19, extrait des versets 28 à 37).
Maryam est prostrée au milieu des autres femmes. Un coup de poignard lui déchire le cœur. Elle voudrait s’avancer et étreindre la pauvre mère qui vient de perdre son fils mais elle voit qu’elle est déjà bien entourée, par les nombreuses « Marie » qui l’entourent. La vision de cette mère amputée de sa chair et de son sang, assise par terre, tenant le corps de son fils sans vie, entre ses bras comme une ultime protection maternelle, lui est insoutenable. Elle laisse court à son propre chagrin et elle en veut à tous ces bienpensants, ces hypocrites qui vont à la synagogue, et jouent les vertueux, alors qu’ils ont le cœur aride et empoisonné par toutes leurs mauvaises pensées. La religiosité est ce qui se voit mais derrière l’apparence, il y a la vérité de l’âme et celle-ci n’est pas forcément agréable à Dieu car elle véhicule des choses parfois malsaines.
***************
(Pages 131 à 141 sur un ouvrage de 222 pages)
******************
Tous droits réservés Viviane B-Brosse alias Sherry-Yanne
L'ÉTRANGE RÊVE DE LUCILE
ISBN 979-8-85478-762-8
Copyright 00067596-7
*******************