EMELINE ET RUPERT

EMELINE ET RUPERT

EMELINE ET RUPERT

Emeline est une fillette de 9 ans, une gamine aux yeux pétillants de malice, une frimousse espiègle. Elle s’évade chaque jour à travers ses rêves qui l’emportent au loin, tellement loin de son univers où elle ne se sent pas heureuse.

Dans sa solitude, elle se réfugie dans les livres, et s’imagine ainsi être l’héroïne des histoires qui enchantent son quotidien.

En ce jour printanier du mois d’avril, Emeline est plongée dans un bouquin, confortablement installée sur le banc du jardin. Elle s’isole ainsi du monde extérieur et de son mal-être d’enfant mal aimée.

- « Bonjour Emeline, ton livre a l’air d’être passionnant ».

Emeline sursaute et se retourne pour voir qui vient de lui adresser la parole.

Il n’y a personne.

Elle se dit qu’elle a sans doute été victime de son imagination, et reprend tranquillement sa lecture.

- « Coucou, je suis à ta gauche, tourne la tête ».

Son étonnement est grand en croisant le regard son interlocuteur.

C’est un chien au pelage noir et blanc, dont le regard est doux et bienveillant.

Le « toutou » l’observe quelques instants, silencieux, puis il reprend :

- « Non, tu ne rêves pas. Je suis effectivement un border-collie, un joli border-collie, tu ne trouves pas ? » rajoute-t-il d’un air taquin. « Mon nom est Rupert et je suis venue à ta rencontre pour t’emmener avec moi dans un royaume magique, un monde fantastique où les animaux parlent et vivent ensemble en bonne harmonie en se comprenant mutuellement ».

Emeline n’est pas surprise par ce dialogue improbable avec un chien. Elle est dans l’âge où le merveilleux n’est pas une utopie.

Elle caresse Rupert, puis lui embrasse affectueusement le museau avant de demander d’un air interrogateur :

- « Moi je veux bien, mais comment fait-on pour partir dans ton univers féérique ? »

- « Dans la cabane au fond du jardin, il y a une porte secrète qui ouvre sur un monde parallèle, où tous les êtres vivants sont heureux de vivre en paix, sans haine et sans violence. Suis moi, je t’emmène au pays magique de l’amour universel ».

Tous deux s’en vont comme deux complices, rejoindre la cabane en bois, dissimulée à la vue par une haie imposante, dont le père d’Emeline se sert pour ranger ses quelques outils de jardinage.

En ouvrant la porte, rien ne laisse deviner qu’une entrée secrète donne accès à un autre monde.

Rupert se faufile derrière des vieilles choses accolées sur le mur du fond et dune de ses pattes, pousse une sorte de planche, ce qui actionne un mécanisme qui fait basculer un passage assez grand pour que même un adulte puisse l’emprunter. Il invite Emeline à le suivre, ce qu’elle fait sans se poser e réelles questions.

Lorsque la porte se rabat sur eux d’eux, ses yeux s’écarquillent de surprise en découvrant l’endroit insolite où elle se trouve.

La luminosité est douce et chaleureuse, et les couleurs sont d’un éclat sans pareil. Il y a même un arc-en-ciel dans le firmament, alors que celui-ci est magnifiquement bleu azur. Tout son être plonge dans cette quiétude idyllique. Elle se sent merveilleusement bien, sereine, en paix, oubliant ses pensées de petite fille triste, qui l’obsèdent très souvent à cet âge délicat de l’enfance, où aucun nuage ne devrait assombrir l’existence.

-« Miaou, où étais-tu Rupert, et que nous ramènes tu » rouspète une voix près d’eux.

Emeline se retourne et voit un petit chat noir au regard vif, qui la scrute de la tête aux pieds ».

-« Du calme Simba, murmure Rupert, c’est la petite fille qui vit dans la maison, de l’autre côté de la frontière de la cabane. Elle n’est pas dangereuse. Cela fait des jours que je l’observe et j’ai remarqué sa tristesse certains jours. J’ai voulu lui montrer qu’elle pouvait trouver un refuge avec nous, pour retrouver son sourire qui disparait certaines fois ».

- «  Bonjour Simba, je m’appelle Emeline et j’ai 9 ans. Je ne peux me lasser de contempler ce paysage coloré magnifique. J’ai l’impression d’être enveloppée dans un voile de tendresse et de beauté. C’est magnifique ».

Simba ronronne (à moins qu’il ne ronchonne à sa manière) tout en se frottant aux jambes d’Emeline et ne répond pas.

Les trois amis s’avancent plus avant dans ce territoire totalement inconnu pour Emeline.

Elle est submergée par une profusion de senteurs suaves et de couleurs chatoyantes, les yeux grand ouverts sur ce qui l’entoure.

Le soleil brille de mille feux, pourtant la chaleur est douce et l’ombrage d’arbres majestueux offre une fraîcheur accueillante. Ils recouvrent de leurs feuillages bienveillants, les chemins du parc où plusieurs espèces d’animaux se croisent, sans méfiance, sans peur réciproque.

Elle va s’asseoir sur un des bancs et observe autour d’elle.

Elle distingue une rivière et des animaux qui s’y abreuvent. Les brebis côtoient les loups dans une confiance absolue.

Plus loin, elle aperçoit un jardin où des arbres fruitiers ploient sous le poids de fruits parfumés.

Elle ne peut s’empêcher de s’extasier sur la magnificence de ce paradis caché.

- « Tu viens jouer à cache-cache avec Simba et moi, je compte jusqu’à cent et je pars à votre recherche » propose Rupert.

La fillette ravie, acquiesce et part se cacher dans une grotte abritée du regard. Simba, quant à lui a du grimper dans un arbre.

La gamine entend Rupert s’approcher de sa cachette. Elle se doute que son flair canin lui a permis de suivre sa piste sans problème.

Elle rit à gorges déployées quand il vient frotter sa truffe sur sa main pour lui signifier qu’il a réussi à la trouver. Quant à Simba, ce fripon sait bien que les chiens ne grimpent pas aux arbres, et il redescend de son perchoir, en narguant on copain canin.

Emeline n’avait jamais été aussi heureuse de sa vie, son regard s’illumine, égayant sa petite frimousse.

Les trois amis ont enchaînés les jeux tout l’après-midi, dans une complicité touchante et sincère.

Lorsque Rupert lui dit qu’il lui fallait rebrousser chemin pour retrouver son univers familial, Emeline sentit l’émotion la gagner et elle manqua de fondre en larmes.

Rupert lui promit de revenir la chercher, chaque fois qu’elle ne serait pas à l’école pour partager avec elle de nouveaux jeux dans son royaume enchanté.

Il tint promesse et revint pendant deux ans puis un jour, elle ne le revit plus. Elle avait grandi, elle entrait au collège et le monde merveilleux n’avait plus d’attrait pour elle.

Les années passèrent.

Le temps et les saisons s’enchaînèrent selon un rythme immuable, marquant la destinée de l’univers depuis des siècles.

Dix ans plus tard Emeline fêta la fin de ses études qui coïncida avec son vingt et unième anniversaire.

C’était le début de l’été.

L’air était frais, et les arbres qui recouvraient la cabane au fond du jardin, ombrageaient celle-ci d’une douceur bienfaisante.

Emeline s’avança et poussa la porte de la cabane, où elle n’était pas revenue depuis dix ans.

A ce moment-là, elle entendit du bruit et vit surgir de la porte secrète son ancien compagnon à quatre pattes. Il s’arrêta net en la voyant, le regard subjugué par l’apparition de sa petite camarade de jeux.

-« Mon beau Rupert, tu es toujours ici, tu n’as pas vieilli. Comme tu es beau et comme tu m’as manqué pendant toutes ces années ».

Elle s’approcha de lui pour le caresser et comme elle l’avait fait douze ans plus tôt, lors de leur toute première rencontre, elle se baissa pour lui embrasser le museau.

A ce moment-là, un nuage enveloppa le toutou.

Emeline était effarée, se demandant ce qui avait bien pu se passer.

Lorsque le nuage s’estompa, elle recula, stupéfaite. Le joli chien noir et blanc avait disparu, laissant la place à un jeune homme d’environ vingt-cinq ans, à la corpulence athlétique, des cheveux bruns et de magnifiques yeux verts.

Elle sentit son cœur battre à toute vitesse devant la nouvelle apparence de son ami cabot, et malgré la situation bizarre elle prit conscience qu’elle éprouvait un véritable coup de foudre amoureux pour cet être qui lui avait donné tellement d’affection dans la tristesse de son enfance .

- « Ne sois pas effrayée Emeline, je suis Rupert, roi du pays d’Edenavie et tu connais déjà mon royaume. Il y a fort longtemps, une méchante sorcière me lança une malédiction, transformant tous les habitants de mon royaume en animaux enchantés. Elle n’a pas pu nous inoculer la haine qui l’étouffait et nous avons ainsi pu résister à son pouvoir, en vivant dans l’amour et la paix. Le sortilège devait cesser lorsqu’une jeune femme, belle et lumineuse, embrasserait mon museau de chien, avec toute sa tendresse, ce que tu as fait, voilà quelques instants. La malédiction est levée pour tous les habitants de mon royaume et je vais aller les rejoindre désormais. Je veux être un monarque bienveillant, et que mon règne soit sage et juste ».

- « Ne t’en vas pas déjà mon cher Rupert, nous venons juste de nous retrouver et je n’ai pas envie de te perdre de nouveau, comme ce fut le cas pendant dix ans. Tu représentes pour moi les moments les plus merveilleux et les plus magiques de mon enfance ».

- « Alors viens avec moi dans mon royaume, et sois la reine de mon cœur et de mon royaume, mon épouse bien-aimée. Il n’y aura plus pour toi, ni peines, ni larmes, ni haine, ni violence, car tous ses sentiments négatifs sont proscrits dans mon monde. Seuls l’amour, la joie, la fraternité, le partage et la paix sont autorisés et il en sera ainsi éternellement. Par contre, tu ne pourras sans doute jamais revenir dans ton monde à toi car le mauvais sort étant annulé, le passage invisible va disparaitre lui aussi, il faut que tu en aies conscience ».

-«  Cà c’est bien vrai », lança une voix rauque dans le dos de Rupert.

Le personnage qui venait de prononcer ces mots s’avança et Emeline découvrit un jeune homme, à la peau sombre et au regard rieur.

Rupert sourit et présenta le nouveau venu

-« Te rappelles tu de mon ami Simba ? Le voici sous sa forme humaine. C’est lui aussi un prince, natif de lointaines contrées et surtout c’est mon ami d’enfance. ».

Emeline avait déjà pris sa décision. Elle savait que le bonheur l’attendait dans ce futur inconnu et elle n’avait aucun regret d’abandonner un monde ou elle n’avait jamais été heureuse, pour suivre son prince d’amour.

Elle écrivit une courte lettre à sa famille, faisant part de sa décision de s’en aller définitivement vivre dans un autre pays, et de ne pas la rechercher car elle avait fait son choix, qu’elle assumait totalement.

Puis elle franchit allègrement la porte secrète, accompagnée de ses deux amis si chers et s’engouffra dans l’univers paradisiaque de ses lointains souvenirs.

La porte se referma définitivement sur eux et plus personne n’entendit parler d’eux.

Ils vécurent sans doute très longtemps, en étant heureux et en ayant de nombreux enfants.

C’est ainsi que se terminent les contes.

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Viviane B-Brosse alias Sherry-Yanne

Ouvrage "Petits Contes et Historiettes"

ISBN 979-8-39254-855-2

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Date de dernière mise à jour : 2024-07-10

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